En passant à Toulouse, j’y apprenais que la prospérité de cette ville a commencé au XIV^eme siècle par la culture d’une plante du nom d’Isatis tinctoria ou pastel des teinturiers; plante d’un mètre de haut aux feuilles lancéolées. Ces feuilles sont séchées, mises en poudre et macérées dans l’eau, laquelle devient bleue. En la desséchant est obtenue une poudre qui sert de teinture. Avec le résidu des feuilles on faisait des boules appelées coucagno en provençal, soit "pastel en pâte". De coucagno vient le mot cocagne lequel désigne un pays où règne l’abondance et la douceur de vivre.
Eh bien, chers amis, par ses réalisations, Françoise Guillaume nous entraîne dans ce pays de cocagne.
Amour de ces bâtonnets de pastel. Amour de ces bleus, qui furent ses premiers essais. Amour de la douceur des couleurs, volontairement dégradées, atténuées.
Le travail - faut-il parler de travail pour elle?- est tout à fait à l’image de l’artiste. Ainsi s’explique la tendresse qui se dégage d’un geste d’enfant, la délicatesse de ses visages, la douceur des regards qui nous accrochent, nous suivent des yeux et dont émane une surprenante force intérieure, une vie intense. Prunelles par delà lesquelles se devine parfois une souffrance qu’il n’est pas possible d’avouer.
C’est peut-être dans les paysages que joue le plus ce petit truc, l’astuce qui permet de reconnaître l’artiste. C’est dans le fond sa technique personnelle. Mais que vaut une technique sans le savoir faire, sans la sensibilité, l’intuition de la personne qui la porte. L’art est fait de ce que l’on voit, de ce que l’on devine et surtout de ce que l’on imagine.
Françoise Guillaume nous fait rêver d’un au-delà que notre condition humaine ne nous permettra jamais d’appréhender. Le paradis, ce doit être quelque chose comme celà.
Merci à Françoise de nous y entraîner.

† Jean-Pierre DICKÈS
Président de la Société Académique du Boulonnais